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Écrivain à 3 Temps
Diane Meur

Samedi 9 octobre 2021
à 15h

Diane Meur, invitée d'Ecrivain à 3 Temps à la Médiathèque de Roanne

Samedi 13 novembre, se tient à la Médiathèque de Roannais Agglomération – Roanne la 2e rencontre de l’édition 2021 d’Écrivain à 3 Temps, consacrée à Diane Meur, au cours de laquelle elle dialogue avec Timothée Demeillers autour de leur inspirations réciproques. En préambule, petit retour sur la 1ère séance, le 9 octobre. 1 h 30 pour mieux comprendre le projet littéraire de Diane Meur. Et l’occasion de mesurer à quel point il est important de donner la parole aux auteurs autrement que dans leurs lignes.

Rencontrer un auteur

La lecture d’un roman laisse au lecteur sa part d’interprétation quant aux personnages, aux lieux, aux ambiances ; le lecteur devient à son tour créateur et projette sa propre sensibilité. Pour qui n’est pas familier de la Grande Librairie ou de France culture, cette projection, il la transfère également sur l’auteur l’imaginant de telle manière, lui prêtant telle intonation, tel caractère… toutes impressions renforcées par des éléments annexes : couverture du roman, photographies de l’artiste…   

 En ce qui concerne Diane Meur, la photographie retenue pour la communication d’Écrivain à 3 Temps mettait en relief ses yeux pénétrants, intenses, qui dénotaient une volonté, une résolution, une force. Tout au long de cet entretien, ce regard étonnant et concentré a révélé une grande attention de Diane Meur portée à ses interlocuteurs, à leurs questions. Tout en s’autorisant, tout à coup, une malice et un pétillement, qu’accompagnaient un rire et un propos humoristique, impromptus, révélateurs d’une fantaisie. Diane Meur ne dit-elle pas d’elle-même « Je n’ai que de drôles d’idées ».

Écrire au fil de l’eau et du temps

Un volontarisme, une fantaisie, donc mais appréhendés de manière sereine. Tranquillité confirmée par la lecture avec laquelle Diane Meur – voix souple et posée – ouvre ce cycle de rencontres, L’eau et les rêves de Gaston Bachelard, un fondement de l’imaginaire et de la créativité de l’auteure. L’eau et les rêves, comme une parabole du désir d’écrire. Car pour Diane Meur, la rivière n’est pas un thème mais une structure et une métaphore. Celle des idées qui surgissent, coulent, découlent, ne s’enferment jamais et se refondent en permanence.

Une perception du flux qui est à l’origine même de la prise de conscience de l’envie d’écrire, quand, jeune fille, elle observait le défilement des paysages, des êtres, des choses, depuis la fenêtre d’une voiture ou d’un train. Écrire ou comment retrouver le plaisir de la contemplation et la rêverie induites par ce défilement, et l’envie de capter ces instantanés.

L’écriture romanesque se fait elle-même sinueuse dans ses premières tentatives. Bien des années après un 1er roman très juvénile, composé pendant ses études, et un long détour par la traduction, l’écriture jaillit un jour, après l’achat d’un cahier. Le flot est alors ininterrompu, un peu partout et sur tout support qui s’y prête, jusqu’aux tickets de métro !

Le flux est également temporel chez Diane Meur. Bien que plusieurs de ses œuvres, Les Vivants et les Ombres, La Carte des Mendelssohn, constituent des sagas familiales, ce n’est pas tant l’Histoire, pour laquelle l’auteur n’éprouve qu’un attrait relatif, que la manière dont les souvenirs, les patronymes, les lieux subissent un perpétuel brassage et dont les êtres – ceux des romans et ceux de la vie réelle – forment l’amalgame de cette sempiternelle reformation. C’est ce creuset de vie, où l’on ne sait jamais ce qui va survenir, quelles ruptures inattendues se feront jour, que Diane Meur investigue dans son écriture, elle qui trouve « fascinant que nous soyons des êtres d’histoire(s) ».

(Mé)Tisser des histoires

Le fait que plusieurs de ses œuvres prennent pour cadre l’Europe Centrale n’est pas sans relation avec ce goût du brassage. Le multiculturalisme qui s’y déploie, héritage de l’Histoire, constitue un théâtre idéal pour que s’exprime le métissage. Et derrière le métissage, c’est également le tissage d’éléments en apparence décousus qui concentre le travail d’écriture de Diane Meur.

C’est particulièrement vrai avec La Carte des Mendelssohn, projet pharaonique tant dans la préparation (le rassemblement et l’analyse d’une manne d’archives liées à la famille Mendelssohn) que l’écriture elle-même.

Si Diane Meur s’ingénie à tisser des liens au cœur de ses romans, elle le fait également entre ses œuvres. Les Vivants et les Ombres, Les Villes de la Plaine et La Carte des Mendelssohn forment, a posteriori, une sorte de triptyque dont le dénominateur commun serait un grand corps : la maison pour Les Vivants et les Ombres, la ville dans Les Villes de la Plaine et la famille-monde dans La Carte des Mendelssohn.    

S’émanciper

Au cœur des échanges qui ont rythmé la rencontre avec l’auteur, revient avec énergie l’aspiration à une forme d’émancipation. L’un des enjeux de Des Vivants et des Ombres est de s’abstraire de la notion d’appartenance, réciproque, des personnages vis-à-vis de la maison, de s’affranchir des destinées tracées d’avance, de se libérer d’une vie enfermée.

Si Diane Meur, à propos de La Carte des Mendelssohn, n’écarte pas l’analogie avec les Rougon-Macquart, elle réfute cependant le principe d’un déterminisme, qu’il soit génétique ou d’un autre ordre. Pour elle, l’humanité est capable du meilleur comme du pire ; chacun demeure maître de son destin.

Diane Meur, invitée d'Ecrivain à 3 Temps, à la Médiathèque de Roanne

  Chacun demeure maître également de ses perceptions. En acceptant de se prêter au jeu d’Écrivain à 3 Temps, Diane Meur a délivré quelques clefs de lecture ou de relecture de ses œuvres, originales ou personnelles. Nul doute que le choix de mettre en relief l’écriture âpre, sans concession, de Timothée Demeillers ce samedi 13 novembre, sera l’occasion d’appréhender d’autres dimensions de sa curiosité artistique. Oui, assurément, il faut donner la parole aux auteurs.

Rencontres littéraires
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