Hozier - Unreal Unearth
L’album Unreal Unearth sorti en août 2023, est le troisième album studio de l’artiste irlandais Hozier. Le chanteur, souriant à moitié enterré sur la pochette de l’album semble émerger d’outre-tombe. Souhaitant retranscrire visuellement et musicalement l’histoire d’un homme revenu des enfers, il s’inspire de l’œuvre de Dante L’Enfer. La structure de cet album est à l’image du cantique, neuf arcs narratifs pour les neufs cercles de l’au-delà.
Né dans une famille vouée à la musique, c’est naturellement qu’Hozier se tourne vers ce milieu et intègre successivement plusieurs groupes de musique pop-rock dès l’âge de 15 ans et poursuit des études de musique à Dublin. En 2013, il connait le succès avec le titre Take me to Church, qui défend la cause homosexuelle à travers une métaphore de la religion. Il puisse déjà son inspiration dans la littérature, en s’appuyant pour l’écriture de cette chanson du poème Chorus Sacerdotum de Baron Brooke et des écrits de l’écrivain britannico-américain Christopher Hitchens. Le chanteur de blues-rock poursuit son engagement à travers ses textes avec la sortie d’autres albums et EP les années suivantes.
Dans Unreal Unearth, à travers le prisme du poème de Dante, où le narrateur parcourt les gouffres de l’au-delà représentés par neuf cercles descendants selon les péchés commis au cours de sa vie, Hozier fait l’examen de thèmes qui lui tient de mettre en exergue, la dévotion, ou encore la brutalité. Dans chaque chanson, il fait la rencontre de nouvelles personnes qui lui partagent leurs griefs, leurs douleurs, leurs expériences et leur prête une oreille attentive. Une idée de perte qui résonne dans l’album, dont la composition commence au début de la pandémie, période propice à la perte et au changement.
L’album débute par le très doux et assez aérien De Selby partie 1 et se poursuit avec le plus indie De Selby partie 2. Le titre fait référence au personnage fictif du roman de Flann O’Brien, Le troisième policier, un personnage ambivalent qui décrit le sens de la vie et de la mort au même titre, celui d’expérience humaine. Il émet l’hypothèque qu’un miroir ne renvoie pas un reflet mais une rétrospection de soi. Hozier partage cette idée dans ses paroles, et décrit la méconnaissance de soi-même comme certes une obscurité mais une obscurité libératrice. L’album se poursuit sur l’ouverture du premier arc avec le très beau morceau First Time. Il est question ici de renaissance où l’amour en est l’origine. Hozier compare le cycle de la vie à celui d’une fleur.
Au cinquième arc, l’interrogateur Who we are fait écho à beaucoup. Les paroles évoquent l’ambition, les espoirs vains qui fatalement amènent à une déception. Est-il seulement fait ici référence à des ambitions personnelles ou à des ambitions plus grandes à l’échelle de la société ? En effet Hozier est un artiste engagé et ce n’est pas la chanson folk Eat your young qui dira le contraire. Présente sur le troisième arc de l’album, cette chanson décrit la cupidité et l’avidité de ceux qui détiennent le pouvoir au détriment des jeunes générations.
L’entraînant Damage gets done en duo avec la chanteuse américaine Brandi Carlile est lui aussi un morceau qui met en lumière la jeunesse. C’est une chanson nostalgique et universelle, qui évoque l’insouciance et la bêtise dont on peut faire preuve jeune. Il déplore également en quelques sortes toutes les accusions, les blâmes qui retombent sur les jeunes générations.
Il est difficile de ne choisir que quelques morceaux pour refléter entièrement la beauté de cet album tant au niveau de la mélodie que des textes empreints de littérature. Un album métaphorique plus sombre et moins pop que ses précédents où Hozier réussit à décrire avec justesse ce qui est insaisissable.