Un si gros ventre - Expériences vécues d'un corps enceint- Camille Froidevaux-Metterie
« Aux yeux du monde comme aux siens propres, la grossesse, c'est le ventre, ce si gros ventre que l'on porte en avant de soi et qui dit la condition maternelle en devenir. »
Fidèle à un discours résolument féministe l’essayiste et universitaire de renom continue de s’interroger sur la place des femmes dans la société et plus particulièrement sur leur corps. Dans cet essai érudit et pertinent Camille Froidevaux-Metterie donne à penser le corps enceint non comme un passage obligé mais comme une possibilité dans l’existence des femmes.
Elle rappelle l’assujettissement du corps féminin réduit à sa fonction biologique de procréation tel qu’il était considéré jusqu’à la moitié du 20 e siècle. En évoquant les combats féministes des années 70, l’auteure montre comment le corps des femmes a finalement pu devenir un des moyens de leur libération par la maîtrise de leur fécondité.
En interrogeant une trentaine de futures mères, patientes de l’hôpital Bichat à Paris, elle interroge l'expérience de la maternité aujourd’hui. Les combats qui restent à mener se situent désormais sur la prise en compte du ressenti émotionnel et de la prise en charge des femmes qui ont choisi d’enfanter. Camille Froidevaux-Metterie aborde sans tabou les pressions qui s’exercent sur les femmes enceintes. Depuis le fameux délai d’annonce de 3 mois à la dépression post-partum, l’auteure analyse les angoisses, la douleur, les injonctions, la culpabilisation.
L'essayiste revendique une meilleure prise en compte des interruptions naturelles de grossesse, un meilleur accompagnement lors des difficultés de l’allaitement ou encore la fin de la honte autour de la dépression post-partum. Elle lève le tabou qui consiste à considérer que la grossesse n'est pas obligatoirement vécue dans la béatitude.
Alors que la sacralisation sociale de la femme enceinte offre le temps d’une grossesse une place à part pour le corps féminin, ce moment suspendu concentre les plus grandes angoisses et les plus beaux espoirs mais ne doit pas réduire les femmes à leur seule fonction reproductive.