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Elena Lappin
Rencontre dans le cadre des Assises Internationales du Roman

Vendredi 25 mai 2018
à 15 h

Portrait, en noir et blanc, de l'auteure Elena Lappin

© Jerry Bauer

Les Assises Internationales du Roman, c’est l’occasion annuelle de découvrir des écrivains du monde entier conviés à des cartes blanches et tables rondes. Cela se passe à Lyon et dans de nombreux lieux du livre en région Auvergne-Rhône-Alpes.

Cette année, la rencontre organisée avec la Villa Gillet est placée sous le double signe de l’histoire et du cosmopolitisme.

Une romancière sans frontières

Elena Lappin, auteure et journaliste, a un parcours exceptionnel. Née à Moscou, elle grandit à Prague sous le communisme, émigre en Allemagne à l’adolescence. Adulte, elle choisit Israël puis le Canada et les Etats-Unis avant de se poser à Londres. Elle parle plusieurs langues et est l’auteur d’un livre autobiographique, Dans quelle langue est-ce que je rêve ?, qui dévoile un parcours familial hors norme, une existence marquée par la grande histoire et bon nombre de secrets.

Les élèves de deux classes de lycée, Notre-Dame à Charlieu et Saint-Paul à Roanne, ont lu ce livre en langue originale, en ont parlé, ont à leur tour écrit et créé un carnet à remettre à l’auteur. Ils étaient présents lors de cette rencontre modérée par Caroline Starzecki, étudiante en master de littérature, et traduite par Isabelle Dujet, interprète. Trois élèves ont offert une belle lecture en anglais du chapitre « The phone call », épisode clé du livre d’Elena Lappin.

Elena Lappin répond aux questions de Caroline Starzecki

© Médiathèque de Roanne

© Médiathèque de Roanne

Les raisons de l’autobiographie

Elena Lappin évoque d'emblée le moment fondateur à l'origine de l’écriture de ce récit très personnel. La révélation de l’identité de son vrai père l’a conduite à enquêter sur le passé familial, sur ses origines à la fois fascinantes et troubles, et en même temps à comprendre la manière dont elle est devenue écrivain. L’exil, les ruptures, le poids du politique sont les fils conducteurs de ce livre, qui est aussi une passionnante enquête historique. Elena Lappin souligne le caractère unique de cette autobiographie, fort éloignée de ses précédents écrits journalistiques ou fictionnels (Le nez ou L’homme qui avait deux têtes) et qui n’inaugure pas chez elle une veine autofictionnelle.

 

Des langues multiples

L’auteur aborde ensuite son amour des langues et les liens serrés qu’elles entretiennent avec l’écriture, la perception de soi et de son ancrage dans l’existence. « Dans quelle langue est-ce que je rêve ? » signifie : quelle est la langue de ma véritable identité ? Où sont mes vraies racines ? Le russe est la langue maternelle, celle dont l’auteur a eu autrefois honte car celle de l’ennemi. Le tchèque est la langue de l’apprentissage, de l’expérience. Avec l’allemand, la connexion personnelle est plus limitée, c’est la langue apprise sous la contrainte éducative. Par contre, l’anglais est une vraie « love affair », la langue dans laquelle Elena Lappin s’est sentie « autorisée à écrire » et qui lui assure une grande audience. Elle parle également de l’importance de l’hébreu comme langue de l’identité culturelle et de son désir d’apprendre l’arabe, qui lui est très proche.

La parole est essentielle. Elena Lappin est farouchement opposée aux secrets de famille. Elle insiste sur la nécessité de leur dévoilement, sur la force de la parole libérée contre la peur qui noue l’expression.

© Médiathèque de Roanne


Un ancrage historique et culturel

A la remarque d’une lycéenne sur l’intérêt pris à cette lecture « illustrant, rendant vivants nos cours d’histoire », Elena Lappin acquiesce : l’histoire n’est pas une abstraction, l’artiste a pour rôle d’incarner ce qui est arrivé aux gens pour que la mémoire en demeure vive. La manière dont les histoires personnelles se nouent, se font écho et contribuent à la grande histoire a été une des découvertes faites par l’auteur lors de l’écriture de son roman.

Elena Lappin est une grande lectrice, même si elle préfère la créativité des séries ces dernières années. Elle revient toujours à Franz Kafka et à Philip Roth qui la fascine par la liberté de son écriture. Elle lit également Anton Tchekhov, Scott Fitzgerald ou Alice Munro. L'influence des écrivains de l’Est la conduit à aimer les récits fantaisistes et drôles, parfois absurdes. C’est sur un tel livre qu’elle travaille actuellement, quelque chose de « pretty crazy » où elle s’amuse beaucoup…

La rencontre se termine par une séance de dédicace et d’échanges plus informels dans une tonalité conviviale... Une citation pour ne pas quitter trop vite l'univers d'Elena Lappin :

Ma mère me dit souvent : "Ma vie est comme un roman. j'aimerais beaucoup savoir comment ça se termine !" Peut-être a-t-elle aussi fait de ma vie un roman - en me donnant mon histoire mais en cachant sa vérité profonde, pour que je puisse la trouver moi-même.

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